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Les écrivains du Tchad interpellent le Garde des Sceaux sur l’affaire de la disparition du journaliste et écrivain Mbaibé Guentar Béba

L’association des Écrivains et Auteurs Tchadiens d’expression française (ASEAT) interpelle le ministre de la Justice, Garde des Sceaux, chargé des Droits humains, M. Djimet Arabi, au sujet de la disparition d’un jeune journaliste et écrivain dans des conditions suspectes à N’Djaména.

Monsieur le Ministre,
Le 10 août 2018, nous avons eu la profonde douleur d’apprendre la disparition de Monsieur Mbaibé Guentar Béba.

Mbaibé n’était pas seulement un frère de plume, mais un frère tout court. Infirmier, écrivain, il collaborait avec plusieurs journaux et avait déjà publié de nombreuses nouvelles. En 2016, il avait été le grand lauréat de la 1ère édition du prix de la nouvelle « Les enfants de Toumaï », que l’ASEAT organise, puis deuxième du prix Joseph Brahim Seid de l’ADEC (Association pour le Développement Culturel). Il était par ailleurs membre du jury de la 2ème édition.

Le 12 juillet dernier vers 18 heures, Mbaibé est sorti de son domicile pour ne plus jamais réapparaître. Ses parents ont bien déposé un avis de recherche à la direction de la police judiciaire, en vain. Selon la version officielle donnée par les enquêteurs de la police judiciaire un mois après les faits, Mbaibé aurait été victime d’un accident de la circulation à la hauteur de l’ancien pont de Chagoua le 13 juillet à 3 heures du matin et serait tombé dans le fleuve Chari. Son corps aurait été repêché par le service de secours de la mairie le 14 juillet à 6 heures et aurait été immédiatement enterré sur instruction du Procureur de la République.

Chose étonnante, la famille de Mbaibé n’a pas été informée de la mort et de l’enterrement précipité de l’écrivain. Elle n’a donc pas pu reconnaître le corps et lui rendre les derniers hommages. Ce n’est pas le seul point troublant de cette affaire. Car, lorsqu’à la famille de Mbaibé a demandé à se rendre sur la tombe du disparu, pas moins de deux tombes ont été désignées par les services de la mairie comme abritant la dépouille de l’écrivain.

Son téléphone portable a été retrouvé chez une femme, qui a assuré l’avoir racheté d’occasion à un boutiquier. Interrogé par la famille de Mbaibé, le boutiquier a affirmé que c’est un agent de l’ANS (Agence nationale de sécurité), la police politique, qui lui avait vendu le téléphone à vil prix. De plus, la moto de Mbaibé a été retrouvée en parfait état au camp de la Garde nationale et nomade du Tchad (GNNT), situé à Farcha. Alors qu’il était déjà décédé et que la famille n’en avait pas encore été informée, un policier s’est rendu au domicile des parents de Mbaibé fin juillet, proposant de monnayer ses services pour aider à retrouver le disparu.

Autant d’indices pour le moins déconcertants qui appellent à une enquête judicaire plus approfondie. L’enquête actuelle n’a, pour le moment, rien donné malgré les efforts de la famille du disparu et le recours à un avocat. Mbaibé était également connu pour ses interventions sur les réseaux sociaux critiquant le gouvernement et sa gestion calamiteuse du pays. Toutefois, par ce présent courrier, nous vous enjoignons de faire simplement respecter le droit.

Nous vous demandons d’instruire vos services de faire toute la lumière sur la disparition ou l’assassinat de Mbaibé Guentar Beba. Une exhumation pour reconnaissance du corps par la famille, et autopsie serait, à notre sens, salutaire. Une audition de l’ensemble des témoins impliqués dans la disparition de Mbaibé se révèle également nécessaire.

Afin que cette affaire ne sombre pas dans les méandres de l’oubli et de l’arbitraire judicaire si courant au Tchad, nous mettons en copie de ce courrier Amnesty International, le Mouvement citoyen pour la préservation des libertés et la Convention tchadienne pour la défense des Droits de l’Homme.

Sachez que, nous autres écrivains de l’ASEAT, que nous résidions au Tchad ou à l’étranger, sommes déterminés à ce que la vérité éclate et que justice soit rendue à Mbaibé. Comptant sur votre diligence dans le traitement de notre demande, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de nos salutations militantes.

Pour l’Association des écrivains et auteurs tchadiens d’expression française (ASEAT),
Le président d’honneur Le secrétaire exécutif

Le président d’honneur: THOMAS DIETRICH
Le secrétaire exécutif: SOSTHENEMBERNODJI

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1 Commentaire

  • kade modeste

    Mourir aujourd’hui ou mourir demain c’est mourir un jour et vue que personne n’est immortelle pour quoi oter a un frere tout simplement par ce qu’il te fait voir tes erreures?

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