CONFERENCE DE PRESSE DU 14 FEVRIER 2019 DE LA CPDC
DECLARATION LIMINAIRE
Présentée par Poddi Djimé Bichara, Porte-parole Adjoint
Messieurs les chefs des partis frères et amis ;
Mesdames, messieurs les journalistes ;
Chers invités ; Mesdames, messieurs.
Nous tenons aujourd’hui notre première rencontre de l’année nouvelle. Et comme il vaut mieux tard que jamais, je formule à l’endroit de chacun de vous et à vos familles, mes meilleurs vœux de paix, de bonne santé, de prospérité et de bonheur.
L’actualité dans notre pays n’autorise pas beaucoup d’optimisme, mais nous ne devons pas pour autant désespérer. Dieu fasse que les aspirations légitimes des Tchadiens à une vie normale et heureuse se réalisent.
Le Président de la République a annoncé des élections avant la fin du 1er semestre de cette année. Ces élections attendues depuis 2015 vont-elles enfin être organisées ? Toutes les conditions sont-elles réunies pour des élections libres, démocratiques, transparentes, équitables et crédibles ? Ces questions et tant d’autres restent posées au regard de l’environnement général pré-électoral délétère, du cadre législatif brumeux et des organes et institutions impliqués dans l’organisation des élections qui sont loin de remplir leurs rôles.
S’agissant de l’environnement général pré-électoral, il faut déplorer que la sécurité des personnes et des biens est difficilement assurée sur l’ensemble du territoire national. Le pays tout entier est au bord de l’embrasement. La crise sociale est loin d’être résorbée. Les revendications légitimes des populations sont soumises au tout répression, pendant que sont systématiquement traqués, les animateurs de la société civile, des syndicats, des médias privés et des partis politiques non inféodés au parti au pouvoir. La neutralité requise des chefs des circonscriptions administratives pendant les élections est devenue pure illusion, la mise en œuvre des décisions issues du forum gouvernemental ayant outrageusement renforcé le rôle politique des chefs traditionnels résolument mis au service du parti au pouvoir.
Le passage en force à la IVème République avec la constitution du 04 mai 2018, aboutit à la concentration de tous les pouvoirs entre les mains du Président de la République. Les institutions et les lois qui en découlent consacrent à l’évidence une regrettable régression démocratique.
Les textes législatifs relatifs aux activités associatives et politiques sont aux antipodes de la recherche de l’approfondissement et de la consolidation du processus démocratique et de la bonne gouvernance.
Les dysfonctionnements et ratés relevés lors des précédents scrutins sont passés sous silence et les mesures correctives proposées superbement ignorées. Le nouveau Code Electoral concocté à huis clos n’augure rien de bon. Pourtant, la répartition des sièges par département à l’Assemblée Nationale, le recensement électoral et le fichier électoral, la pratique de la biométrie intégrale avec kits d’enrôlement, de distribution des cartes et d’identification d’électeurs, aussi bien que le respect des délais dans les différentes opérations électorales sont parmi d’autres, les points qu’il faut impérativement régler.
La mise en place des organes paritaires pour la conduite des opérations électorales est largement biaisée. Le CNDP d’aujourd’hui comme d’hier, est une coquille vide. Il doit être repensé dans ses prérogatives, sa composition et son fonctionnement. Quant à la CENI, elle n’a jamais reçu l’indépendance voulue. Le Bureau Permanent des Elections (BPE), conçu pour être l’instrument technique de la CENI, est placé d’autorité sous le contrôle du Ministère de l’Administration du Territoire.
Après plus de vingt (20) années de pratique électorale, il est plus que temps que le Tchad rompe avec les mascarades pour enfin organiser des élections crédibles. La tenue d’une table ronde consacrée à cette problématique est indispensable, compte tenu de l’importance des problèmes à régler et des enjeux de paix et de stabilité.
A ce stade de la réflexion visant l’amélioration du cadre organisationnel des élections dans notre pays, la démarche du chef de file de l’opposition surprend désagréablement. Comment comprendre que l’ordonnance 20/PR/2018 du 07 juin 2018, dénoncée et rejetée par tous les paris politiques, y compris ceux de la majorité présidentielle, soit invoquée pour la constitution de la CENI ? S’appuyer sur cette ordonnance démocraticide a amené les partis de l’opposition à rappeler au chef de file que son rôle est purement protocolaire. La loi ne lui confère aucunement le pouvoir de gérer les partis politiques de l’opposition. Cette équivoque doit être définitivement levée.
Il convient aussi de lever toute équivoque concernant le rôle des troupes françaises basées au Tchad. Il n’est pas dans le rôle de la France d’encourager les affrontements fratricides dans notre pays. La preuve de cette ingérence de la France dans des conflits internes a été apportée par le ministre français des Affaires étrangères qui affirme que l’intervention française était destinée à empêcher un coup d’Etat organisé par le neveu contre l’oncle. Une lettre qui ne s’appuie pas sur une convention ou une résolution d’une organisation internationale qui en a la vocation, telle que les Nations Unies, ne constitue nullement une base légale et ne saurait légitimer cette opération qui cache mal la volonté des autorités françaises de nous ramener à une époque que nous croyions révolue, celle d’avant la deuxième guerre mondiale.
La CPDC appelle les protagonistes à la cessation immédiate des hostilités et à s’engager dans la voie du dialogue politique inclusif que nous prônons depuis des années. C’est la seule voie de salut pour le Tchad.